En novembre dernier, la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM) a été frappée par une arnaque appelée « fraude au président ». Après deux jours de tractations et plus de soixante mails échangés, des escrocs ont réussi à débloquer deux virements du service administratif de la FFCAM pour un montant total de 383 510 euros.
Charles Van der Elst, le président récemment élu à la tête de la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM), se serait bien passé de cette crise de début de mandat. En se faisant passer pour lui, des escrocs ont réussi à prélever près de 400 000 euros des comptes de la fédération. Une enquête est en cours pour démanteler le réseau de cette arnaque intervenue début novembre 2025.
Tout part d’un mail puis d’un coup de téléphone reçus le 6 novembre 2025 par l’une des salariés de la FFCAM. « Ce mail parlait d’une opération financière ultra urgente à traiter, avec notamment le contact d’un pseudo-avocat. Au téléphone, celui-ci s’est montré très convaincant », relate le président de la FFCAM auprès de nos confrères de France 3 Auvergne-Rhône-Alpes.
« Ils se sont montrés trop gourmands en demandant un troisième virement »
Cette technique dite de la « fraude au président » est bien connue. En se faisant passer pour le président d’une structure et en jouant sur l’urgence, les escrocs parviennent à leurs fins : débloquer des fonds. Dans le cas de la FFCAM, ce petit manège a convaincu le service administratif d’autoriser une dépense de 383 510 euros, en deux virements et après plus de soixante mails échangés par la salariée et l’escroc pendant deux jours.
« La salariée était vraiment convaincue : le ou les escrocs l’ont complètement retournée. Ce n’est que quelques jours plus tard, après un week-end, qu’ils se sont montrés trop gourmands en demandant un troisième virement. Ça lui a mis la puce à l’oreille et elle en a parlé à sa supérieure hiérarchique. C’est à ce moment-là que nous avons découvert la supercherie », raconte encore Charles Van der Elst.
Un cas d’école
Ce type de stratagème est de plus en plus courant en France et touche aussi bien des entreprises que des associations ou des particuliers. Dans un article du Dauphiné libéré, les anciens présidents de la FFCAM reconnaissent que des failles dans les procédures de validation ont pu permettre la fraude… sans s’imaginer arriver à de tels montants.
Rémy Mullot, prédécesseur de Charles Van der Elst entre janvier 2023 et mars 2025, s’interroge : « Même si ce genre de fraude peut arriver partout, nous devons nous poser la question : comment des décisions censées être contrôlées par plusieurs paliers ont-elles pu aboutir à un virement frauduleux ? ». La FFCAM rassemble plus de 108 000 licenciés et fédère des centaines de clubs à travers la France. Cette escroquerie ne touche pas seulement les comptes de la fédération, elle blesse l’âme d’un mouvement basé sur l’engagement bénévole et la confiance collective.
La FFCAM est malgré elle un cas d’école qui réunit tous les ingrédients d’une fraude au président. Ce type d’attaque repose en effet sur trois piliers principaux : l’usurpation d’identité numérique par l’intermédiaire d’emails ou d’échanges par une messagerie instantanée similaire à celle utilisée par le président, la pression temporelle avec une demande urgente pour tenter d’outrepasser les procédures habituelles et en dernier ressort la confiance interne dans la structure ciblée afin de réduire les vérifications croisées.
Une perte qui ne devrait pas affecter les projets en cours
Les autorités françaises estiment que les arnaques financières représentent des centaines de millions d’euros de préjudice chaque année en France, touchant des organisations, des entreprises… et des associations comme la FFCAM. La fédération a déposé plainte et travaille désormais avec la Brigade des fraudes aux moyens de paiement (BFMP) pour retracer le parcours des virements. Des virements qui ont malgré tout été effectués. « On verra si l’enquête de police mène au démantèlement de ce réseau. Mais je ne pense pas que l’on pourra récupérer cet argent », regrette le président de la FFCAM.
Aucun doute qu’un renforcement des mécanismes de contrôle interne et des procédures de validation des dépenses interviendra également dans les prochains jours. Depuis la fraude, « des mesures d’urgence ont déjà été prises pour sécuriser les paiements, en particulier la mise en place d’une double signature électronique systématique pour les virements, qui n’était pas en vigueur jusqu’alors », explique Charles Van der Elst. Quant aux conséquences de cette perte de budget, le président assure que cela n’affectera pas les projets en cours. La fédération a un budget annuel d’environ 14 millions d’euros.
Photo d'en-tête : FFCAM









