Apparue pour la première fois en 2020 dans l’Est de la France, cette infection virale aux séquelles neurologiques transmise par les tiques s’est étendue depuis vers la région Rhône Alpes, selon le rapport que Santé publique France vient de publier. En première ligne, la Haute-Savoie, mais pas que.
On sait que les tiques sont les vecteurs de la maladie de Lyme, bien connue aujourd’hui et en hausse dans l’Hexagone – 60 000 nouveaux cas y étaient recensés en 2019, contre 26 000 entre 2009. En cause, le réchauffement climatique, mais aussi la diminution de la population de renards, prédateurs naturels des rongeurs propageant ces acariens dont certains sont porteurs du virus, selon plusieurs études.
Mais la piqûre de ces acariens qui ne se nourrissent que de sang peut également provoquer une inflammation du cerveau : l’encéphalite à tiques. Une affection relevée pour la première fois au printemps 2020. 43 personnes habitant l’Ain étaient alors atteintes de méningites, de méningo-encéphalites ou de symptômes grippaux. Toutes avait été contaminées par le virus de l’encéphalite à tiques (TBEV) après avoir consommé du fromage de chèvre au lait cru. Il s’agissait de la première infection par voie alimentaire connue en France, le TBEV se transmettant généralement par piqûres de tiques.
En Europe, la République tchèque, l’Allemagne et les pays baltes sont particulièrement touchés par cette affection virale grave, mais en France les cas autochtones s’affichent à la hausse. Au point que depuis mai 2021, l’encéphalite à tiques fait partie des maladies à déclaration obligatoire, rappelle Santé publique France qui vient de publier le bilan des deux premières années de surveillance de ces cas d’encéphalite à tiques (TBE) sur la période mai 2021 à mai 2023. Cet état des lieux rendu public il y a quelques jours montre que les infections acquises sur le territoire français sont plus nombreuses que celles acquises lors de voyages à l’étranger.
Qu’est-ce que l’encéphalite à tique ?
Ce virus, d’allure grippale atteint le système nerveux central (cerveau et moelle épinière) dans une proportion importante des cas. 40 % de ceux-ci peuvent présenter des séquelles neurologiques – maux de tête, sensibilité à la lumière, vertiges et troubles de la concentration et de la marche – pendant des semaines, voire des années, précise le rapport. La maladie est mortelle dans environ 1 % des cas.
Quelles sont les zones les plus concernées selon le rapport ?
La Haute-Savoie est le département ayant rapporté le plus de cas au cours de ces deux années, alors que la reconnaissance du virus y est beaucoup plus récente qu’en Alsace, apprend-on. La région Auvergne-Rhône Alpes est dorénavant une zone importante de circulation du virus, avec des massifs particulièrement à risque, tels que le Forez. A noter que la zone de circulation du virus atteint le sud de l’Ardèche, département qui devrait faire l’objet d’une vigilance particulière, selon les rapporteurs.
Combien de cas ont été recensés et quels sont les profils touchés ?
- 71 cas ont été notifiés entre mai 2021 et mai 2023, (30 en 2021, 36 en 2022 et 5 en 2023). 86% était des cas d’infection « autochtone », autrement dit contractés en France (61 cas) et 14 % (10 cas) avaient été infectés à l’étranger, dans un pays « à risque ».
- Sur ces 71 cas, 4 étaient des enfants de moins de 16 ans et 15 des plus de 65 ans.
- 94 % des cas ont été hospitalisés, mais aucun décès n’était survenu au moment de la déclaration.
- A noter que seuls 15% des personnes touchées exerçaient des professions les exposant particulièrement à des piqures de tiques : éleveur ou famille d’un éleveur ou ouvrier d’élevage de chevaux ou ruminants, agent de l’Office National des Forêts horticulteur, forestier ou étudiant en lycée agricole.
Faut-il se faire vacciner ?
Deux vaccins sont actuellement disponibles en France, explique le Vidal. Ils sont préparés avec des souches différentes de virus inactivés (ENCEPUR, TICOVAC). Cette vaccination est recommandée chez les voyageurs adultes et enfants exposés en pays très endémique.
Pour en savoir plus : le vaccin contre l’encéphalite à tiques | Vaccination Info Service
Prévenir la contamination, les 7 bons gestes à adopter
La grande majorité des piqûres de tiques n’entraînent pas de transmission de maladies. Reste que si l’on ne prend que l’Ixodes ricinus – la tique la plus répandue en Europe et principal vecteur de maladies, 38 bactéries, parasites et virus, sont potentiellement transmis via sa salive lorsqu’elle pique ses victimes, selon une vaste étude publiée par quatre équipe de l’INRA. Aussi, d’avril à novembre, les raisons de se protéger contre les tiques ne manquent pas.
1 Soyez vigilants
Les tiques sont présentes dans des zones boisées et humides. Elles apprécient les grandes herbes qui leur servent de tremplin pour atterrir sur votre peau ou sur votre chien. Mais un quart des piqûres ont lieu dans les jardins, selon les données du programme de recherche participative CiTiQUE relayées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). On sait que, dans le cas de la maladie de Lyme, moins de 1 % de la population touchée transmet la bactérie à sa descendance, et par voie de conséquence, ces dernières ne sont généralement pas infectantes le temps de la morsure. Reste que la menace est suffisamment inquiétante pour qu’on prenne des précautions.
2 Avant une sortie, adoptez le bon équipement
Vous pouvez repousser les tiques de la même manière que vous éloignez les insectes. « Les répulsifs qui contiennent du DEET (N,N-diéthyl-3-méthylbenzamide) sont très efficaces contre les tiques, tout comme ils le sont contre les moustiques. Si vous êtes régulièrement à l’extérieur dans des endroits où vous savez qu’il y a abondance de tiques, vous pouvez aussi porter des vêtements traités à la perméthrine », qui éloigne les insectes. On conseille également de porter des manches longues et des pantalons pour éviter que les tiques n’entrent en contact avec votre peau. De couleur claire de préférence afin de pouvoir les repérer plus facilement. Vous pouvez rentrer votre pantalon dans les chaussettes ou les chaussures hautes et votre t-shirt dans le pantalon. Pensez également à couvrir tête et cou avec un chapeau ou casquette, notamment pour protéger les enfants qui ont la tête à hauteur des herbes hautes et des buissons.
3 Sur le terrain, réduisez les risques
Restez au centre des sentiers. Evitez de vous assoir ou de vous allongez directement sur le sol (utiliser un drap par exemple). Vérifiez régulièrement l’absence de tiques.
4 De retour chez vous, sachez débusquer les intrues
Les tiques vont se développer sur les animaux et les êtres humains qui ne les remarqueront pas, c’est leur stratégie de survie. Si vous les repérez, retirez-les. Beaucoup de maladies ne se transmettent pas immédiatement, cela peut prendre des heures. Si vous vous trouvez dans une zone connue pour ses tiques, faites des contrôles quotidiens (ou plus fréquents) de tout votre corps. Les tiques recherchent généralement des endroits chauds et humides, cuir chevelu, aisselles, aine, à l’arrière des genoux ou derrière les oreilles. N’oubliez pas de faire vérifier votre dos par un ami.
5 Apprenez à les enlever
Vous avez trouvé une tique sur votre corps ? Débarrassez-vous en au plus vite. Si la tique ne vous pas mordu, il n’y a vraiment pas de quoi s’inquiéter. Il suffit de la brosser ou de la ramasser avec un mouchoir. Si elle vous a mordu, alors elle s’est accrochée. Il est préférable d’utiliser une pince à tique pour l’enlever, mais elles ne fonctionnent pas toutes avec les tiques de petites tailles. Dans ce cas, utilisez une pince à épiler. Tenez la tique le plus près possible de votre peau, puis retirez-la directement. Essayez d’éviter d’écraser le corps, et faites de votre mieux pour l’enlever entièrement. Certains remèdes populaires consistent à toucher la tique avec une allumette allumée ou à la couvrir de vaseline, mais les experts le déconseillent formellement. Et surtout ne jamais utiliser d’éther ou tout autre produit. Une fois la tique retirée, désinfectez bien la plaie. L’essentiel est de minimiser le temps où la tique reste sur vous. Car ce n’est pas parce qu’on est mordu par une tique infectée que l’on attrape nécessairement la maladie. Toute dépend du stade de développement (larve, nymphe, adulte). De plus, 17h à 24h de fixation sur une personne sont requises pour que celle-ci contracte la maladie. Vous n’avez pas de pince à épiler dans votre sac à dos ? Vous devriez, mais bon. A défaut, deux cartes de crédit en plastique feront l’affaire, à la rigueur.
6 Soyez attentif aux symptômes
Après une morsure de tique, faites particulièrement attention à tout symptôme. Si dans les jours ou les semaines qui suivent vous commencez à ressentir des malaises de type grippal, ou si vous voyez une éruption cutanée près du site de la morsure, faites-vous examiner par un médecin. L’éruption cutanée est un symptôme courant de la maladie de Lyme, mais elle n’apparaît pas chez tous les patients. Un traitement précoce par antibiotiques permettra de se débarrasser complètement de la maladie de Lyme.
7 Et pour ceux qui ont un chien…
Avant tout, prenez des mesures préventives pour empêcher les tiques d’atteindre votre chien. La plupart des colliers antipuces fonctionnent également pour les tiques et agissent comme insecticide ou répulsif. Il existe également un vaccin contre deux maladies transmises par les tiques : la babésiose (piroplasmose) et la maladie de Lyme. Et si votre chien se promène dans des champs herbeux et humides, vérifiez soigneusement qu’il n’a pas été mordu. Vous devriez pouvoir sentir ou voir une tique, surtout si elle est engorgée de sang. Retirez-la de la même manière que vous le feriez sur vous : placez la pince à épiler près de la peau, attrapez la tique et retirez-la.
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