C’est une expérience presque mystique, une pratique niche : profiter des thermiques pour monter en quelques heures à plus de 7 000 mètres et en descendre en volant. Ou en skiant. De quoi éprouver un sentiment de liberté absolue. Voilà pourquoi cinq pilotes de parapentes sont partis dans les montagnes du Karakoram au Pakistan. Une expérience inégalée, dont le réalisateur britannique Jake Holland a tiré un film de 33 minutes aux images saisissantes.
« Ce qui est vraiment magique ici », raconte l’un des pilotes, « c’est le sentiment de liberté. Il s’agit simplement de savoir jusqu’où ton imagination peut aller, et quels risques tu es prêt à prendre. C’est une nouvelle approche pour accéder à la montagne. Normalement, pour aller au Diran (7 266 m) nous avons besoin de trois jours de marche. Soit une semaine pour en faire l’ascension. Mais avec le parapente, il est possible de décoller à midi par exemple, de voler et d’atterrir le même jour sur le Diran autour des 6 500 mètres d’altitude. À partir de là, il te suffit de monter pour aller au sommet et en revenir. Je peux donc faire une montagne de sept mille mètres en une journée ! C’est quelque chose de nouveau pour moi. J’aime découvrir cette nouvelle façon d’aborder la montagne ».
Chargés de skis, on voit les pilotes enchaîner ainsi deux sommets de l’Himalaya distants de 30 km. Du jamais-vu. Reste qu’il s’agit d’une des choses les plus difficiles techniquement en parapente, dont le résultat n’est jamais garanti. « C’est ce qui rend cette pratique aussi addictive », poursuit le parapentiste. « Tu ne sais jamais exactement si tu pourras profiter du ciel pour te rendre là où tu as prévu d’aller. Mais quand ça marche. Il y a presque un élément magique à voyager de cette façon. Tu n’es pas loin d’avoir un balai volant (…). C’est une véritable surcharge sensorielle. J’ai l’impression que nous sommes libres de nos mouvements à travers le monde, sans être soumis aux règles habituelles. Mais le problème avec cette sorte de paralpinisme, c’est que lorsque tu atterris sur une montagne, tu n’y es pas arrivé à pied, alors tu ne peux pas forcément en descendre à pied ».
Antoine Girard en a fait l’expérience. L’un des moments forts du film est son vol en solo et son ascension du Diran (7 266 m), atteint à 20 heures après avoir décollé de Karimibad (2 500 m) à 12 h 15. Après une nuit « difficile » sur la montagne, où l’altitude le rend malade, il en descendra très éprouvé. Heureux d’avoir fait le sommet ainsi, mais conscient qu’il vient de pousser ses limites très loin : « les deux jours les plus durs de ma vie », dit-il.
Photo d'en-tête : Jake Holland