En juillet dernier, ce jeune cycliste pro australien réussissait, seul et en totale autonomie, sa propre Grande boucle : 5510 km en 18 jours. Un hommage aux premières éditions, un condensé de l’esprit du Tour de France de 1903 et de la tendance actuelle du cyclisme, le bikepacking. Comme à son habitude, Lachlan Morton en a tiré un documentaire passionnant où l’on découvre son quotidien sur les routes de France et surtout son cheminement personnel depuis la quête de performance vers la quête de sens.
Ce type-là est infiniment sympathique, et en 38 minutes de film il va vous réconcilier avec le cyclisme pro, malheureusement entaché de sales affaires depuis trop longtemps. Ou plutôt il va vous faire voir le vélo de route comme ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être. Une histoire de passionnés, prêts à en baver pour aller jusqu’au bout de leur but et de leur plaisir. Pas étonnant que sur son passage, le long des routes du Tour, les gens l’encouragent, l’accompagnent un bout de chemin ou lui glissent une bouteille d’eau alors qu’il roule, seul, sans peloton ni assistance.
Son idée ? Non sélectionné pour le Tour de France, l’Australien qui à 29 ans, a déjà couru l’épreuve deux fois et remporté le Tour de l’Utah en 2016, choisit de faire sa propre course qu’il baptisera « l’Alt Tour », comme « alternative », comme un hommage à la première édition de 1903, pure et dure. Mais à sa façon, en mode bikepacking. Bien dans l’esprit de quelques exploits déjà à son actif : il a notamment gravi deux fois l’équivalent en dénivelé de l’Everest dans la même semaine et parcouru en autonomie totale en 2014, avec son frère Gus, ancien coureur professionnel lui aussi, les 2500 kilomètres reliant leur lieu de naissance, Port Macquarie au monolithe de grès sacré situé au centre de l’Australie, Uluru. Une expédition dont sera tiré un documentaire « Thereabouts », réalisé par Gus.
Mais cette fois, c’est seul qu’il part sur les routes le 26 juin dernier. Et contrairement aux 184 cyclistes du peloton, pour lui, pas d’hôtels, de masseurs ni de mécaniciens. Seulement une tente, un duvet, un réchaud et quelques chambres à air. Pour ravito, des sandwiches achetés en boulangerie, de l’eau, du coca et du lait chocolaté en bouteille. C’est peu pour un athlète qui ne se contentera pas de parcourir les 3350 kilomètres officiels. Car il pousse la rigueur jusqu’à couvrir à vélo les distances entre les villes d’arrivée et de départ, ajoutant 2127 kilomètres au tracé du Tour de France 2021 et pas moins de 60 000 mètres de dénivelé positif. Sa dernière étape ? Relier Bordeaux à la périphérie de Paris en 550 kilomètres et 4000 mètres de dénivelé positif.
Au total, c’est donc 5510 km en 18 jours qu’il va rouler. Et comme le cycliste australien reste fidèle à lui-même, il a voulu le faire d’une seule traite, à savoir « une étape aussi longue qu’en 1919, la plus longue de l’histoire du Tour, afin d’avoir une idée de ce que cela pouvait représenter », nous a-t-il expliqué. Car c’est bien là tout son propos : revenir aux sources de l’épreuve cycliste la plus célèbre au monde. Mais en marge de la compétition, un système où, par égoïsme, il estime « avoir montré le pire de sa personnalité, explique-t-il dans le film. Au-delà de l’extraordinaire exploit sportif – « le plus dur que j’aie jamais fait », dit-il – c’est donc une fabuleuse histoire humaine que l’on suit ici. Et s’il fallait retenir un chiffre, c’est le montant des dons recueillis tout au long de son parcours extrêmement suivi sur les réseaux sociaux et par des dizaines de médias : à savoir 500 000£ ( 588 000 €) qui, grâce à lui seront versés à « World Bicycle Relief », association visant à équiper en vélo les plus démunis qui, dans le monde entier, en ont besoin pour travailler ou étudier.
Photo d'en-tête : Lucy Le Lievre- Thèmes :
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