En avril dernier, le leader mondial de l’équipement outdoor mettait sur le marché une étonnante tente blanche excluant toute teinture, procédé notoirement polluant. Une innovation sortie tout droit de ses laboratoires de recherches. Aujourd’hui, c’est une collection textile très minimaliste en série limitée et destinée aux baroudeurs, qu’ils viennent de mettre au point. Quatre basics techniques intemporels produits en Europe dont tout le cycle de vie a été décrypté et optimisé. Résultat : jusqu’à – 80% d’émissions carbone. De quoi nourrir de futurs développements pour la marque qui ne compte pas s’arrêter là.
Effet de mode, coup de pub ? Quand en avril dernier le spécialiste de la « tente 2 secondes » lance une nouvelle gamme composée d’une tente, d’un sac de couchage et d’un matelas gonflable au design épuré… Tout blanc. On s’interroge. Or, au-delà du côté esthétique, c’est sur l’aspect environnemental que Decathlon s’est concentré en éliminant tout processus de teinture. Très gourmande en eau et produits chimiques, cette étape est l’une des plus polluantes de la chaîne de production textile. La marque a donc décidé de l’écarter pour ces trois nouveaux produits, à commencer par la tente sur laquelle seul un traitement anti-jaunissement a été appliqué. Résultat : des émissions de CO2 réduites de 15%. Une innovation qui en réalité en cachait d’autres, l’arrivée de cette gamme immaculée s’inscrivant dans le cadre des toutes nouvelles « Minimal Editions » développées par Forclaz depuis le Mountain Store, son centre de conception situé au pied du Mont Blanc . Des séries limitées, très pointues, poussant encore plus loin les procédés d’éco conception déjà mis en œuvre par la marque.
Baptisée « Undyed » (« non teint »), cette capsule blanche précède en effet un deuxième chantier engagé par l’équipe de Forclaz, la marque trekking de Decathlon. A savoir la création de quatre produits techniques, un sweat, une parka, un pantalon et un duffle bag. Des basiques, intemporels et durables – à glisser dans son sac avant de prendre la route, le temps d’un week-end ou bien plus – regroupés sous la collection « Local ». « L’idée ici », explique Delphine Dupré, ingénieure produit et cheffe de file Minimal Editions, est de « confectionner une gamme de produits au plus faible impact CO2 possible. Grâce à nos recherches, nous avons identifié le mix énergétique – ou, autrement dit, l’énergie utilisée dans une région et donc dans les usines de production qui y sont associées – comme un levier important de baisse d’impact. En effet, il peut représenter jusqu’à 40% de l’impact C02 d’un produit. Il s’avère que l’Europe, et particulièrement la France, font partie des zones les plus faiblement carbonées du monde. Une évidence s’est imposée à nous : relocaliser sur notre continent. Si nous avons fait ce choix de production, complexe à mettre en oeuvre, ce n’est pas pour apposer une simple étiquette « made in France », ni pour seulement réduire les étapes du transport, mais aussi et surtout pour faire baisser l’impact environnemental des produits via la consommation d’énergie faiblement carbonée ».
Une garde-robe minimaliste et durable
A ce jour cette piste est explorée sur les quatre produits de la capsule Minimal Editions-Local. Une goutte d’eau parmi les 700 que compte la collection de Forclaz, mais qui devrait faire date. Car cette série limitée – 250 exemplaires seulement pour la parka, 1500 pour le pantalon, 1500 pour le sweat et 500 pour le sac – est au cœur des recherches engagées par Decathlon pour développer des produits de trekking et de voyage sac à dos ayant le plus petit impact environnemental possible.
« Au quotidien, nous essayons d’aborder les choses avec lucidité et humilité : nos produits ne sont pas parfaits, et nous non plus… », reconnait Frédéric Mô, leader Forclaz. « Pour autant, nous avons à cœur de poursuivre le combat. Années après années, nos convictions grandissent et notre engagement se renforce. Le rêve de notre équipe de conception ? Que chaque produit Forclaz soit si durable qu’il puisse être transmis de génération en génération, sans perdre en technicité, ni en esthétisme ». La gamme « Minimal Editions – Local » et sa garde-robe minimaliste made in France sont animées par cette philosophie et font aujourd’hui office de laboratoire pour Decathlon qui peut y développer ce que l’on peut faire de mieux en termes d’éco-innovation, sans compromis sur la technicité. C’est là que la marque peut tester de nouveaux procédés, explorer les possibles, tracer une voie qui pourra être empruntée par d’autres produits par la suite.
Miser sur l’Europe et viser le plus faible impact CO2 possible
Le choix de produits textile n’est d’ailleurs pas un hasard. Chez Forclaz, cette catégorie de produits représente 60% des émissions CO2, selon Delphine Dupré. Pour concilier innovations durables et fabrication locale, c’est donc toute la chaine de production qui a été remise à plat. « Nous avons dû explorer des filières industrielles différentes en France et en Europe : de la confection de la matière première, à l’assemblage du produit, en passant par le tissage et la découpe », explique-t-elle.
Un projet qui aura nécessité pas moins de deux ans de recherches et de tests, guidés par six objectifs : freiner la surconsommation, en offrant des vêtements de voyage polyvalents, adaptés à toutes les situations avec une durée de vie la plus longue possible. Produire localement, en France et en Europe, avec une électricité moins émettrice de CO2 grâce à des partenaires de confiance ; de manière raisonnée, en optimisant notamment la consommation de tissu, en diminuant les chutes à la découpe grâce à un patronage adapté et en favorisant les matières responsables, résistantes, performantes, recyclées. Réduire l’usage de la teinture, voire s’en dispenser totalement. Et enfin produire une collection en quantité limitée, vendue exclusivement en France, Suisse et en Allemagne, afin de tester, pas à pas, la viabilité de produits pour le moins inhabituels chez Decathlon, notamment au niveau des tarifs.
-80% d’équivalent CO2 par rapport à un produit made in China
Il faut en effet compter 90 euros pour le sweat, contre 25 euros pour un modèle lambda de la marque. Tissé en Italie et confectionné au Portugal, sa production n’aura émis que 4,74 kg équivalent CO2. Soit -73 % par rapport au même produit sans éco-conception et fabriqué en Chine. Il doit sa jolie tonalité aux tissus recyclés, triés au préalable par couleur, ce qui a permis de garantir un tissu coloré sans passer par l’étape de teinture. Il est résistant (avec ses 22% de polyamide) et chaud (grâce à ses 65% de laine recyclée 290g/m2), et s’adapte aux explorations et aventures en plein air. Pensé pour les pratiques sportives, les odeurs de transpiration sont limitées grâce aux propriétés intrinsèques de la laine. Au départ un tshirt devait le compléter, une « première peau ». Mais sa confection s’est finalement révélée très complexe. Six matières différentes ont été testées, dix prototypes ont été réalisés en laine recyclée ou française… Il faudra donc attendre un peu avant de le voir rejoindre la micro collection « local ».
Le pantalon est lui aussi proposé à 90 euros. 100% recyclé (50% de coton recyclé et 50% de polyester recyclé), sans teinture et made in France, c’est LE produit qui a permis la plus grande baisse d’émission de CO2 sur cette collection capsule avec -80% d’équivalent CO2 émis pour sa production. Confortable, résistant, sa coupe est légèrement ample et son tissage renforcé (au niveau des genoux et des fesses). Son petit plus ? Une poche sécurisée par un zip est placée sur la jambe.
La parka, dont le tissu extérieur trouve son origine dans la confection des vêtements de chantier, est commercialisée au tarif de 250 euros. Pour ce produit très technique tissé en Belgique, découpé et confectionné en France, le bilan carbone est de -11% de CO2 émis (en comparaison du même produit, sans éco-conception et fabriqué en Chine. Véritable alliée technique pour toutes les aventures, cette parka respirante et PFC free a été testée pendant 2H sous 60 L de pluie par heure et par m2. Verdict : elle résiste à 20 000 schmerbers pour une imperméabilité sans faille ! Elle se veut également très résistante, grâce au tissage en polyester recyclé qui la compose. Et pour aller plus loin dans l’éco-design, elle a été pensée pour être réparable, grâce à son assemblage thermocollé.
Pour compléter la panoplie, le duffle bag. Éco-conçu sur tous les points (100 % recyclé, sans teinture et made in France), il se démarque également par sa technicité et son adaptabilité. Le volume du sac est ajustable de 30 à 50 L et peut être porté à la main comme sur le dos. Son tissage biface renforcé lui apporte une résistance à toute épreuve. Quant à son bilan carbone : 8,75 kg CO2 équivalent CO2 émis. Soit -64 % CO2, toujours en comparaison avec un produit similaire, sans éco-conception et fabriqué en Chine. C’est l’un des produits dont l’équipe est le plus fière, notamment pour son enduction déperlante, à base d’acrylique et de cire d’abeille.
En vente dans 4 magasins tests seulement et sur internet
Au final donc, quatre produits durables, des classiques destinés aux hommes dans un premier temps, à découvrir dès maintenant dans quatre magasins tests en France et en Suisse (Genève – Blandonnet ; Annemasse ; Bordeaux – Mérignac ; Paris – La Madeleine ) ainsi que sur internet en France, Suisse, Belgique et Allemagne. Un modèle de legging femme est en cours de développement, il devrait compléter la collection capsule d’ici 2024. En attendant, Decathlon poursuit l’introduction de coton recyclé dans ses produits. Déjà présents dans certains t-shirts et tapis de yoga, on devrait le trouver en 2024 dans les produits de la gamme travel de Forclaz. Notamment les pantalons travel 100 et les chemises Travel 100 en flanelle.
C’est donc à pas mesurés mais constants, qu’avance le géant de l’outdoor qui peut déjà mettre à son actif une performance rarement médiatisée. Chez Forclaz, la plupart des produits sont intemporels. D’une année sur l’autre, vous allez donc retrouver 75% de la gamme textile. De quoi lui permettre de travailler l’amélioration continue de ses produits dans la durée sans inonder la planète de tonnes d’invendus.
PARKA – MINIMAL EDITIONS LOCAL
250€
SWEAT – MINIMAL EDITIONS LOCAL
90€
PANTALON – MINIMAL EDITIONS LOCAL
90€
DUFFLE BAG – MINIMAL EDITIONS LOCAL
100€
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