Ancrées dans notre imaginaire collectif depuis des décennies, certaines marques nous sont si familières qu’on croit tout savoir sur elles. C’est le cas de Columbia, un classique de notre équipement outdoor dont l’histoire est pourtant jalonnée de faits étonnants. C’est ce que nous avons découvert en allant faire un tour dans les couloirs d’une marque qui, en 85 ans est passée des chapeaux pour messieurs aux vestes de haute montagne équipées d’une technologie thermique réfléchissante inspirée par les recherches de la NASA.
1. Au départ, une entreprise familiale de chapeaux
L’album de famille de Columbia, c’est un peu celui de l’Amérique, l’éternelle histoire du migrant parti chercher asile et fortune de l’autre côté de l’Atlantique. Pour les parents de l’ancienne présidente Gert Boyle, Paul et Marie Lamfrom, c’est l’Allemagne nazie qui en 1937 les pousse à quitter l’Europe. Ils échoueront à Portland où ils se mettent immédiatement à la fabrication de chapeaux, sans doute inspirés, eux aussi, par les fâcheux éléments – pluie, neige ou soleil ardant, qui déjà faisaient le charme de la région. Pour le nom, ils font simple. Ce sera « Columbia Hat Company », d’après le fleuve Columbia tout proche. En 1948, Gert, la fille de Paul, épouse Neal Boyle qui tout naturellement (à l’époque !) reprend l’entreprise familiale, désormais tournée vers le marché de l’outdoor et rebaptisée Columbia. Hélas, en 1970, Gert Boyle perd son mari, il n’a que 47 ans. Elle se retrouve à la tête de la société et d’une famille de trois enfants. Elle ne connaît rien au business. Mais, secondée par son fils Tim, elle prend l’affaire en main et fait « toutes les conneries possibles », raconte-t-elle dans une vidéo intitulée « Comment je suis arrivée là ». Résultat : Columbia est vouée à la faillite en 1971. Vendre la boite ? Elle n’y pense pas; on lui en offrait 1400 US$. « Tant qu’à la bousiller, autant le faire moi-même! », explique-t-elle. Et Gert est inspirée. Au milieu des années 70, Columbia introduit du Gore-Tex dans ses vestes. L’affaire décolle. Et ne replongera plus. En 85 ans d’existence, quatre générations s’y sont déjà succédées. Tim Boyle est aujourd’hui PDG de l’entreprise et son fils Joe l’a rejoint en tant que vice-président exécutif de Columbia Sportswear Company et président de la marque Columbia.
2. La météo est exécrable dans l’Oregon ? « Le spot parfait pour tester les produits outdoor ! »
Curieusement, c’est parce qu’il fait un temps à ne pas mettre le nez dehors à Portland, dans l’Oregon, Etat de la côte ouest américaine notoirement connu pour ses longs hivers froids et neigeux et ses étés étouffants, que la marque a cru bon de se lancer dans la production de vestes et autres équipements outdoor. Car, nous explique-t-on au siège de l’entreprise, ce sont les meilleures conditions pour tester les produits dans les pires conditions qui soient, pluies à verses, rafales de vents et températures négatives alternant avec chaleur et humidité l’été venu. Rien de plus facile en effet que de compléter les tests d’imperméabilité ou de respirabilité en laboratoire par des mises en situation sur les terrains les plus éprouvants. Surtout quand, autour de vous, depuis des lustres maintenant la philosophie générale, toutes générations confondues, est de bouger, quel que soit le temps. Et d’aller explorer la côte Pacifique, le légendaire Mont Hood, les gorges et rivières toutes proches ou encore le désert qui, ici, n’est jamais bien loin. Bref, au final, le spot idéal !
3. Tout a commencé avec une histoire de poissons
« Chez Columbia Sportswear, quand nous fabriquons des produits, c’est toujours pour répondre à un besoin » aime-t-on dire dans l’entreprise. Visiblement ce n’est pas que du baratin marketing, mais une tradition familiale. La légende veut que lorsque Neal Boyle était encore à la tête de l’entreprise en 1958, il partageait avec un groupe d’amis une passion pour la pêche à la ligne. L’idée de créer pour son mari un gilet de pêche s’est naturellement imposée. Justement, Gert savait coudre, elle s’est assise à sa machine et s’est mise à l’œuvre. De ses mains sortira un gilet de pêche doté de nombreuses petites poches pour ranger son matériel de pêche à la mouche. Le produit fait des envieux, qui immédiatement passent commande à Gert qui se rend vite compte que la demande est croissante pour ce qu’on appelle alors les « vêtements de plein air ». Les origines de Columbia Sportswear peuvent donc, en partie, être attribuées à ce premier gilet de pêche cousu à la main. Un héritage que la marque n’a pas renié depuis, au contraire. En 1996, Performance Fishing Gear, ou PFG en abrégé, sera lancé et connaîtra un véritable succès dans le monde entier. Au point que cette année Columbia a décidé de lancer une petite capsule PFG en Europe sur son site.
4. Drôle de logo cette « bestiole »
La bestiole (the bug, en anglais), chez Columbia c’est comme ça qu’on appelle le logo marquant tous les produits de la maison. Quatre petites barrettes, plutôt discrètes certes, mais dont la signification nous avait échappée jusqu’à ce qu’on nous explique que le « Bug » est simplement une représentation graphique stylisée d’un motif de tissage textile de base qui a été adopté comme logo de l’entreprise en 1978 ». Depuis, rien n’a bougé. Preuve que la marque n’a pas besoin d’en faire des tonnes pour continuer à s’imposer.
5. Gert Boyle, femme de fer, et « mère pleine de bon sens »
Quand en novembre 2019 décède « One Tough mother », la matriarche qui a fait de la marque américaine un des leaders du marché de l’outdoor, elle a 95 ans. Grande gueule et bourreau de travail, celle qu’on surnommait « Ma Boyle », laisse un vide immense. « Se coucher tôt, se lever tôt, travailler comme une damnée et faire de la pub ! ». Gertrude (Gert) Boyle, Présidente de la marque américaine Columbia avait le sens de la formule. Et elle savait plus encore les appliquer. A 92 ans, la Présidente se rendait encore tous les jours au siège de Columbia, dans l’Oregon. Et si son fils, Tim assurait le rôle de PDG depuis 2013, le boss, c’était elle, à l’heure de valider un nouveau produit ou une campagne de pub. Un domaine dans lequel elle aura laissé une empreinte indélébile qui bouleversera l’image de la marque. Car c’est son rôle dans une campagne publicitaire des années 1980 qui l’a fait connaître au niveau national.
6. Des pubs (très) décalées
Il fallait être sacrément gonflée et s’appeler Ma Boyle pour choisir le ton si particulier qui, au final, définira toutes les campagnes publicitaires de Columbia. Dans les années 80, elle n’hésite pas en effet à se mettre en scène, elle, ses employés, et surtout son fils, Tim, testant leurs créations dans des conditions naturelles extrêmes : vent, neige, froid, pluie. Implacable, toujours plus exigeante, elle n’épargne rien aux produits ni aux testeurs. Et surtout pas au malheureux Tim, un homme charmant aux airs de Woody Allen.
Ton décalé, dérision, humour, les montages sont hilarants et terriblement efficaces : Gert Boyle devient alors le visage de la marque. Aux antipodes des pubs mettant en scène des nymphettes. Une photo emblématique d’une campagne, sur laquelle on la voit, le bras fléchi orné d’un tatouage « Born to Nag » (« raleuse née », autrement dit « emmerdeuse ), est d’ailleurs toujours accrochée au siège de l’entreprise à Beaverton. Tous ses employés se souviennent de cette forte personnalité qui n’épargnait rien ni personne, et dont les « Gertism », ou coups de gueule, étaient redoutés. Du caractère donc mais aussi des convictions et une bonne dose d’humour, la recette de la cheffe du gang Boyle fait toujours recette aujourd’hui, si on en juge par la dernière campagne de pub de la marque « Be the Goat ». Totalement décalé, ce nouveau spot au ton assez british joue sur les termes GOAT (« Greatest Of All Times », le meilleur de tous les temps) et the goat (la chèvre). Il fallait oser mais, là aussi, ça marche.
7. L’invention du 3 en 1
Si le marché de l’industrie produit quantité de « nouveautés » chaque saison, les vraies innovations dans la vie d’une marque se comptent bien souvent sur les doigts d’une main. La veste Bugaboo en fait partie. En 1986, la marque sort en effet ce qui deviendra son produit iconique, la veste « 3 en 1 ». Son succès est tel qu’elle fera même son entrée au musée Smithsonian, aux États-Unis, et la marque s’imposera dans tous les réseaux de distribution américains. Le principe ? Un design révolutionnaire. La veste technique est dotée d’une isolation en polaire zippée qui peut être portée avec la veste extérieure en nylon. De même, la veste en nylon peut être portée avec ou sans la polaire isolante intérieure. « Ainsi, pour le même prix, vous obtenez une veste imperméable, une veste isolante et une veste de ski – le 3-en-1 était né ! », s’enthousiasme la marque. Une révolution. Columbia enregistrera des chiffres record avec un million de Bugaboo vendues en 1992. Et ce produit marquera l’histoire de l’industrie du vêtement de ski. Aujourd’hui, le principe, « l’Interchange » reste le même mais s’est encore affiné. Le marque propose différents types de couches : des polaires, des softshells mais aussi des pièces isolantes (en duvet ou synthétiques), sans parler de membranes techniques développées par Columbia.
8. Pas moins de 240 brevets déposés
Le plus rentable en affaires, c’est de dépendre le moins possible des autres. Une évidence que Ma Boyle a sans doute faite sienne, car en 85 ans d’existence la marque a développé pas moins de 240 brevets. Et pas pour le show. Pour de réelles innovations. Au point qu’en 2021, 70% de ses revenus provenaient de ses propres technologies, telles que Omni-Heat Infinity, OutDry Extreme ou Omni-Shade. Dans ses labos de Portland, l’équipe de R&D travaillant sur les vêtements et les chaussures continue de plancher sur des solutions aux problèmes de chaleur, de sécheresse, d’humidité, de froid ou de protection. Sans parler bien sûr de la durabilité, comme l’illustre son récent OutDry™ Extreme ECO. Au lieu d’utiliser la même l’approche datant de 40 ans pour fabriquer des vêtements de pluie, la marque a décidé de repartir de zéro. Ce faisant, elle a développé un moyen d’éliminer les composés perfluorés (PFC) sans dégrader les performances. Ici ne sont utilisés que les matériaux les plus durables et éthiques disponibles, dérivés notamment de bouteilles en plastique, des tissus sans colorants et du duvet responsable.
9. Une doudoune révolutionnée par la technologie de la NASA
En matière de rétention de la chaleur le principe est resté le même pendant des millénaires : des peaux de bêtes des hommes des cavernes aux doudounes modernes. Et ce, jusqu’à il y a une dizaine d’années. À cette époque, une petite équipe de chercheurs de Columbia a commencé à développer un nouveau type de technologie de rétention de la chaleur, basée sur un concept que la NASA utilisait depuis 1964. Dans l’espace, il n’y a pas d’air et on ne peut donc pas l’utiliser pour retenir la chaleur. Le centre de recherche spatial américain a donc mis au point des films recouverts de métal pour réfléchir l’énergie thermique. « La plupart des consommateurs connaissent les couvertures spatiales de la NASA et les couvertures thermiques d’urgence, popularisées par les marathoniens qui, dès la fin des années 70, s’en enveloppaient à leur arrivée pour éviter l’hypothermie », explique en effet le Dr Haskell Beckham, Directeur du centre de recherches de Columbia. « Mais personne n’avait pensé à en mettre à l’intérieur des vestes », poursuit-il. « Car le problème avec l’insertion d’une feuille d’aluminium dans une veste de montagne, c’est que, même si la couche est suffisamment fine pour rester souple et confortable, elle n’est pas respirante, si bien que vous finiriez par cuire et à transpirer comme un fou. C’était donc notre plus grand défi ».
La solution était simple, mais il fallait y penser. « Il suffisait d’appliquer la feuille d’aluminium sur le tissu sous la forme de petits points. Les points eux-mêmes reflètent la chaleur et les espaces entre les points ont les mêmes propriétés que le tissu normal, ce qui lui permet de respirer. Nous avons juste trouvé comment appliquer la même technologie sans compromettre la respirabilité du textile », résume le chercheur. Une technologie développée par étape, la marque procédant pas à pas, afin de voir comment, très concrètement, jusqu’où elle pouvait aller. Dans un premier temps, il y a dix ans, elle lance ainsi « Omni-Heat Reflective », en version argent, couleur originelle de l’aluminium. Sa gamme compte alors environ 30 % d’aluminium métallique sur la surface du tissu. Une étape cruciale. Mais on peut aller plus loin encore quand on sait que la relation entre la réflexion de la chaleur et la couverture de la surface est assez linéaire – plus de métal sur le tissu équivaut à plus de chaleur réfléchie. De quoi donner des idées, mais aussi faire sérieusement réfléchir. Car si la surface est trop métallique, la respirabilité, et donc le confort, s’en trouvent affectés. « Nous savions que nous pouvions augmenter la surface couverte par le métal, mais la question était de savoir de combien avant que le tissu ne soit plus respirant », précise Haskell Beckham.
Il faudra des années de recherches – et deux autres étapes, Omni-Heat 3D et Omni-Heat Black Dot – au chercheur et à son équipe pour étudier les variables et déterminer le taux de transfert de vapeur d’eau (MVTR) en fonction de la couverture de la surface, avant de constater qu’il n’y avait pas de baisse de la respirabilité à condition de se limiter à 65 % de couverture du textile. Les produits conçus avec la technologie Omni-Heat Infinity présentent donc un motif de points plus ou moins grands avec une couverture d’aluminium de 50 à 60 %. Soit deux fois plus que l’Omni-Heat Reflective, la technologie initiale qui avait déjà convaincu nombre d’adeptes de l’outdoor, séduits par ces produits offrant chaleur, respirabilité et légèreté !
10. « La Hike Society » ou comment rendre sexy la rando
La rando n’est plus un truc de vieux, une évidence pour qui est allé trainer ses chaussures sur les GR ses dernières années. Mais si un peu partout dans le monde, on peut en « remercier » la pandémie de Covid qui a donné des envies d’air pur aux plus accros au canapé, au Royaume-Uni Columbia y est pour beaucoup, via sa « Hike Society », jeu de mots mixant « high society » et « hike », gens de la haute (ou de l’altitude) et rando. L’idée ? Revaloriser la rando un peu plombée jusqu’à présent pas une image vieillissante et offrir à tous les jeunes candidats à l’aventure une plateforme fourmillant de conseils, de guides mais aussi de randos en groupes.
Une myriade de petits « clubs » de marcheurs s’est ainsi créée. Tous se réunissent lors de l’Annual General Hike, organisé à la fin du mois d’avril. En octobre dernier l’événement a rassemblé pendant un week-end entier des communautés de l’outdoor influentes venues des quatre coins du pays. Plus de 600 randonneurs ont ainsi participé à ces randonnées totalement gratuites. Mais l’expérience ne devrait pas s’arrêter là, selon Pascale Graffmann, responsable du marketing chez Columbia, la marque ayant développé récemment un nouveau partenariat avec l’Allemand Megamarsch, à l’origine de randonnées à participation réellement « massive ». Une collaboration à suivre de près.
Pour en savoir plus sur Columbia, visitez : www.columbiasportswear.fr, vous y découvrirez la nouvelle collection Facet™ , des chaussures de randonnée tout-terrain et ultra-accrocheuses.
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